Terre 530
Alors que sa femme lui dévorait le visage en lui infligeant une douleur indicible, Milorad ne ressentit soudainement plus rien. Était-il mort ? Non ! Il sentait toujours la présence de sa femme sur lui, lui extirpant des lambeaux de chairs avec ses dents. En pleine possession de ses moyens, Milorad parvint à exercer toute sa force et à repousser violemment sa femme hors du lit. A son tour il se releva et bondit du lit sur sa femme pour se mettre à la dévorer à son tour.
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Terre 6782
Plongé dans l’obscurité, Millehard ne voyait plus que ce qu’il prit dans un premier temps à des torches aux couleurs azur. Après quelques secondes, l’une de ces torches l’approcha et lui demanda s’il allait bien. Pour la première fois de sa carrière, Millehard était décontenancé. Pour une raison inconnue, il voyait dorénavant ceux qui l’entouraient comme des torches. Puis, peu à peu, clignement d’œil après clignement d’œil, sa vue se précisa et les torches prirent formes humaines jusqu’à parfaitement distinguer leurs contours et même les traits sur leurs visages.
« - Ce n’est rien, j’ai juste eu une violente migraine. Ça va mieux maintenant ! » assura-t-il en se redressant.
Au plus profond de lui, une peur indicible prit racine lorsqu’il comprit qu’il était devenu ce qu’il chassait sans aucune pitié : un cryptide.
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Terre 864
Milla Hillariak avait laissé derrière elle le cadavre de Roger pour suivre son flair et découvrir d’où émanait l’important flot d’odeurs qui l’avait déconcentré à peine quelques minutes plus tôt. Son odorat l’amena à un lieu de la forêt où les odeurs semblaient converger. C’est alors que sa vue se troubla un instant pour redevenir normale ... au détail près qu’elle voyait dorénavant des fumerolles éthérées tout autour d’elle tandis qu’elle discernait encore le paysage autour d’elle.
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Terre 251
Tandis qu’Amilcare se relevait lentement en observant la zone autour de lui où la végétation était passée de vie à trépas en un instant, il sentit de puissants relents nauséabonds lui parvenir aux narines. Ces odeurs ne lui étaient pas inconnues. Il n’existait rien d’autre au monde qui puisse dégager une pareille puanteur qu’un charnier putride en pleine décomposition. Mais Amilcare était désorienté. Il se dirigeait certes droit sur un charnier, mais il était encore loin. L’odeur ne devrait donc pas être aussi puissante. Et quand bien même il s’y trouverait, la puanteur ne pourrait pas être aussi insupportable. Insupportable, jamais Amilcare n’aurait pensé devoir utiliser ce terme pour qualifier le fumet que dégageait une fosse commune. D’ordinaire elle ne l’indisposait pas mais cette fois elle était bien plus forte, plus pénétrante. C’est alors qu’il vit les relents prendre une manifestation visible à l’œil nu. Ce fut comme des traînées noires qui se dirigeaient toutes vers lui. Pour la première fois depuis longtemps, Amilcare connut la peur. Il eut tout juste le temps de reculer de deux pas que les nuées l’enveloppèrent telle une bure sombre et sinistre.
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Terre 326
Après un moment de doute, Milciades se replongea dans le rhum en compagnie de ses hommes, hurlant plus que chantant des chansons à peine compréhensibles. Soudain, le pirate connut un malaise. La fièvre le gagnait, sa température corporelle grimpait à une vitesse vertigineuse. Un feu intérieur semblait le consumer. Bientôt, son corps se mit à irradier d’une luminosité azur. Ses yeux, sa bouche, sa gorge, son ventre, toutes les parties charnues de son corps se mirent à luire de bleu avant que son corps ne s’enflamme complètement dans un brasier bleu. Le pirate se mit à hurler sous ce supplice lorsque son corps semblât exploser littéralement, propageant une puissante vague de flammes dans tout le bar.
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Terre 6783
Sans dire un mot de plus, Hamilton Tombstone se précipita hors de la salle où le conseil de la Tombe se tenait. Il poursuivit jusqu’à atteindre le toit du bâtiment. Là, il scruta le ciel nocturne à la recherche d’un quelconque avion. Il fut rejoint à peine quelques secondes plus tard par les vampires de sa garde rapprochée. Tous se mirent à imiter leur dirigeant lorsque l’un d’eux perçut quelque chose. C’était bien un avion. L’un de ces convoyeurs de mort qui avaient mis fin à la Seconde Guerre Mondiale et qui s’apprêtaient à réitérer leur massacre de masse avec un seul et unique engin : une bombe nucléaire.
Dans l’esprit de Tombstone, il n’y avait plus qu’une chose à faire : fuir le plus loin possible de ce lieu qui allait devenir un véritable enfer sur Terre. Sans crier gare, il s’élança et bondit de toit en toit avant d’atterrir dans la rue et de courir aussi vite que possible. Sa nature de vampire lui conférait une rapidité hors norme mais même cela n’allait pas le préserver de l’effroyable explosion qui allait suivre. De nombreux vampires le suivirent, ne se posant pas la question d’un tel agissement. Ils adoptaient un parfait comportement moutonnier et suivaient aveuglément leur leader. Parmi le bruit de leur cavalcade, ils entendirent soudain un sinistre sifflement. La bombe venait d’être larguée de l’avion. Dans quelques secondes, elle frapperait le sol de la Tombe et provoquerait des centaines, des milliers de victimes. Hamilton tenta de courir encore plus vite. Poussant ses capacités à l’extrême, sentant ses jambes le brûler, Hamilton entendit alors la bombe toucher le sol. Derrière lui, l’explosion qui s’ensuivit fut terrible. Les flammes ravagèrent la Tombe rue après rue, se propageant comme un gigantesque raz de marée incinérateur. En quelques secondes, les flammes éclairèrent déjà la rue dans laquelle courait Hamilton. Le souffle de l’explosion les rattrapa et les projeta avec violence vers l’avant. Au moment où les flammes allaient les atteindre, le vampire vit l’espace se fissurer devant lui. Lui et plusieurs de ses congénères traversèrent la brèche créée par le souffle de la bombe et arrivèrent dans une autre dimension suivis de près par les flammes radioactives de la bombe.
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Terre 9633
Cela faisait près de quatre heures que la banquise était plongée dans une semi-pénombre. C’était ce qui ressemblait le plus à une nuit en plein été austral. Dans quelques minutes à peine, le soleil reviendrait illuminer l’Antarctique. C’était l’heure à laquelle les scientifiques de l’expédition se levaient après un bon café. C’est alors que plusieurs des instruments laissés sur la banquise s’affolèrent à l’insu de leurs propriétaires, que ce soit les magnétologues ou Postridge. A peine quelques secondes après que les instruments ne commencent à relever des mesures hors normes, un pan du tissu de cette dimension se brisa littéralement déversant un torrent de flammes sur la banquise. Le bruit et la lumière qui accompagnèrent ce phénomène attira bien évidemment l’attention des scientifiques. Tous enfilèrent leurs parkas et se précipitèrent à l’extérieur. Agoraphobe de nature, Émile Postridge suivit tout de même le mouvement. Ils eurent à peine le temps d’observer la brèche dimensionnelle se refermer et de voir les flammes se dissiper. Mais les flammes n’étaient pas la seule chose que la brèche avait amenée. Sur la glace une dizaine d’hommes se roulaient dans tous les sens pour étouffer les flammes qui leur brûlaient le dos.
Ni une, ni deux, la grande majorité des scientifiques partirent leur porter secours, tous sauf Émile. L’homme sentait au fond de lui qu’il ne fallait pas qu’il s’approche de ces hommes.
« - Vous avez besoin d’aide ? » demanda l’un des magnétologues à l’homme le plus proche d’eux.
L’homme releva péniblement la tête et tendit la main vers lui. Le scientifique s’avança comme pour l’aider à se relever. C’est alors que la créature, Hamilton Tombstone, le saisit fermement et enfonça ses crocs dans sa gorge. S’abreuvant du sang du magnétologue, Tombstone vit son état s’améliorer à vue d’œil. Les autres vampires l’imitèrent presque instinctivement. Les scientifiques se firent massacrer sous les yeux de Postridge. Celui-ci fut pétrifié par cette vision d’horreur. Soudain, un déclic se fit dans son esprit. Il allait être le suivant, il devait trouver une arme pour défendre sa vie. Malheureusement, les seules armes à feu qu’ils possédaient, dans l’éventualité où des ours polaires s’aventureraient sur leur camp, étaient enfermées dans une armoire située dans l’abri à l’autre bout du camp. Il savait que jamais il ne pourrait l’atteindre sans être rattrapé par ces monstres. Il pensa alors à la foreuse solaire des glaciologues. Par chance il savait s’en servir puisqu’il s’y était intéressé la veille et que les glaciologues avaient eu l’amabilité de lui faire une démonstration. L’outil était bien plus proche de lui que les armes et il estimait avoir toutes ses chances pour l’atteindre et s’en servir contre ces monstres. Sans réfléchir plus, il s’élança sur la glace et courut droit vers la foreuse.
Derrière lui, les vampires l’aperçurent et se lancèrent à sa poursuite. Comme si son instinct le lui dictait, Postridge finit sa course jusqu’à la foreuse en glissant, lui permettant d’esquiver les deux vampires qui lui sautaient alors dessus et qui lui passèrent au-dessus. Se saisissant de la foreuse, Émile l’activa et la pointa sur les deux vampires qui revenaient à la charge. Le puissant rayon thermique qu’émit la foreuse incinéra les deux vampires en un instant. Sans attendre, il se retourna et pulvérisa trois autres vampires qui s’approchaient de lui. Il les massacra jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un : Hamilton. Fonctionnant sur ses réserves, quand il eut s’agit de tuer Hamilton, la foreuse s’arrêta faute d’énergie. Aussi bien Émile que Hamilton, les deux hommes s’immobilisèrent suite à ce retournement de situation. Émile fut le seul à comprendre ce qui venait réellement de se passer et il se mit à maudire le soleil de ne pas encore être réapparu. Au contraire, Hamilton se mit à sourire de toutes ses dents.
« - Ta fabuleuse arme semble t’avoir lâché au pire moment qu’il soit, mon ami » lui adressa-t-il.
Hormis la promesse d’une mort imminente, quelque chose dérangea Émile dans la voix d’Hamilton. Elle lui semblait étrangement familière. Avant qu’il ne comprenne de quoi il s’agissait, le vampire fut face à lui. La vérité leur éclata au visage au même moment : ils avaient l’impression de se voir dans un miroir déformant.
« - Tu ... Tu es mon ... double d’une autre dimension ? » fit alors Postridge en mettant bout à bout tout ce qui venait de se passer.
« - Une autre dimension ? ... Cela signifie une nouvelle chance ! Fêtons cela en buvant ! » déclara Hamilton qui saisit Émile.
L’homme esquiva de justesse les mains griffues d’Hamilton qui cherchèrent son cou mais qui attrapèrent son avant-bras droit. Qu’à cela ne tienne, Hamilton le mordit donc au bras. Curieusement, Émile ne sentit aucune douleur et continua de se débattre, frappant Hamilton à la tête avec la foreuse. Las de se prendre des coups sur la tête, Hamilton immobilisa l’autre bras.
« - Oh ! On ne peut plus boire tranquille maintenant ? » lui dit-il en souriant.
C’est alors que les premiers rayons du soleil apparurent à l’horizon. Ils vinrent chauffer la couenne d’Hamilton comme un barbecue lèche une brochette. Le vampire se mit alors à hurler de douleur. Cherchant un abri du regard, il se précipita vers l’un des abris des scientifiques, laissant Émile, plus mort que vif, sur la banquise. Alors que le vampire fulminait à l’intérieur de l’abri, Émile vit la foreuse se réactiver. Fronçant les sourcils et ne ressentant toujours aucune douleur, il se releva et dirigea tant bien que mal la foreuse vers l’abri où Hamilton s’était réfugié. Il se mit à tirer à tout va avec le faisceau thermique, n’épargnant aucun mètre cube de l’abri. Quant il eut fini, l’abri était méconnaissable. Émile avança fébrilement vers lui pour s’assurer de la mort du vampire. Le peu qu’il put voir de l’intérieur le stupéfia. Il y avait là une nouvelle brèche dimensionnelle donnant sur une autre dimension et par laquelle le vampire s’était enfui. Lâchant la foreuse, Émile se précipita sur ses instruments et releva avec précision les données qu’ils affichaient avant de perdre connaissance et de s’étendre sur la banquise.
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Terre 1960 - Columbia
Alors que la déflagration d’énergie s’était dissipée, personne dans la pièce n’osait bouger, se demandant ce qui venait d’arriver. Finalement, ce fut Miles qui le premier brisa le silence.
« - Ça s’est bien passé vos p’tites vacances ? Je vois que Cochran s’est doré la pilule sur une plage tandis qu’Isaac a été se baigner. Pour ma part je me suis fait draguer par une gothopouffe adepte du bondage ... ça n’a pas duré longtemps ».
« - Qu’est-ce qu’on fait pour Wade ? » demanda Jeremiah.
Leur compagnon était toujours figé dans une douleur indicible. Régulièrement, une nouvelle fissure apparaissait, comme sortant de son crâne, et déchirait le tissu de cette réalité. Des brèches s’ouvraient et disparaissaient par intermittence autour d’eux. Chacune d’entre elles donnaient sur une nouvelle dimension. La majorité du groupe semblait absorbée par les visions d’autres mondes qui s’affichaient sous leurs yeux.
« - Ma "sœur" a tenté de le disperser dans diverses dimensions ... pour une raison inconnue, elle a raté son coup ce qui a entraîné sa perte ... et qui entraîneras bientôt la perte de toute chose » dit alors l’Elizabeth de Rapture.
Tous se tournèrent alors vers elle.
« - De quoi parles-tu ? » lui demanda alors Frédéric.
« - La confrontation entre ma sœur et votre ami a fracturé le tissu de nombreuses réalités. Dorénavant, un très grand nombre de ces réalités se rencontrent dans cette pièce et ça ne fait qu’empirer. Je ne sais comment l’expliquer mais j’ai le pressentiment que si l’on ne fait rien, tout va disparaître » dit-elle, toujours harnachée sur son fauteuil d’opérations chirurgicales.
Alors que le groupe attendait une réplique cinglante de la part de Frédéric, celui-ci eut son attention attirée par l’une des brèches dimensionnelles. Il s’en retrouva complètement absorbé. Voyant cela, ce fut Jeremiah qui prit donc sa place.
« - Pourquoi te croirions-nous ? Après tout, tu es aussi Elizabeth, celle-là même qui nous a manipulés à son gré ».
« - Je n’ai pas eu l’occasion de vivre longtemps auprès d’elle mais le peu que j’ai connu d’elle m’a suffit pour la haïr. Je suis certes son double mais cela n’implique pas pour autant que je partage ses pensées ».
Inexplicablement attiré par la brèche qu’il avait face à lui, Frédéric vit soudain une silhouette apparaître. Il s’agissait là d’un lycanthrope. A l’instant où le lycanthrope le remarqua, Frédéric se métamorphosa involontairement en lycanthrope également. leurs regards plongèrent l’un dans l’autre comme s’ils étaient hypnotisés l’un par l’autre. Soudain la voix de Wade sortit Frédéric de sa transe.
« - C’est elle ... qui nous a ... déjà envoyé de ... l’aide » dit-il péniblement.
« - Wade ? Comment tu vas ? » lui demanda Miles.
« - Je n’avais encore ... jamais connu une ... douleur aussi ... singulière ... Je sens que ... le multivers est ... sur le point de ... s’effondrer ... » dit-il avec la plus grande peine du monde.
« - Que pouvons-nous faire ? » demanda alors Frédéric.
« - Libérez-moi ! Moi seule suit susceptible d’enrayer ce phénomène » dit alors Elizabeth.
« - Faites ... ce qu’elle dit ... »
Jeremiah s’avança vers elle et se plaça derrière le fauteuil, là où la seringue plantée dans le dos d’Elizabeth était visible.
« - Je l’enlève à trois ! » dit-il en serrant fermement la seringue.
« - D’accord » répondit la jeune fille.
« - Un ... »
Le vampire retira alors la seringue d’un coup sec au prix d’un horrible cri de douleur de la jeune fille.
« - Vous aviez dit à trois » lui dit-elle avec un sourire forcé tandis que Jeremiah tranchait ses liens.
Se relevant avec peine de la chaise, la jeune Elizabeth mit quelques secondes avant de retrouver un parfait équilibre sur ses jambes. A peine cela fut-il fait qu’elle entreprit de déployer son pouvoir de manipulation des réalités pour empêcher le cataclysme annoncé.
Une à une, les premières brèches dimensionnelles disparurent en rétrécissant jusqu’au point de disparaître. Mais à peine réussit-elle à en refermer une cinquième, qu’Elizabeth s’arrêta. Elle était en sueur et haletait énormément. Manifestement, l’effort était extrême.
« - C’est pas possible ! J’en peux ... déjà plus ? » fit-elle, ressentant un sentiment mélangé de dépit et de frayeur.
« - Je ne comprends pas ... c’est comme si les siphons étaient toujours actifs » ajouta-t-elle en regardant les deux énormes machines que Miles et Frédéric avaient éteintes.
« - Ces siphons ici présents sont hors service, néanmoins je détecte un pic énergétique tout aussi singulier à cinq kilomètres d’ici, plein ouest ! » signala alors Isaac en affichant un hologramme de la structure où le drone détectait le dit pic énergétique.
« - Il y a trois siphons ? » fit Cochran.
Frédéric jeta un coup d’œil là où se situait la brèche qui avait tant attiré son attention, malheureusement elle avait été l’une de celles que la jeune Elizabeth était parvenue à refermer.
« - Je m’en charge ! Dès que vous pouvez retourner sur Rapture, ne m’attendez pas ! » dit-il en passant la porte de la salle d’opérations.
Dans le couloir, Frédéric n’hésita pas une seconde et envoya une boule de feu sur une fenêtre pour la briser.
« - ATTENDS ! Tu vas avoir besoin d’un transport pour t’y rendre ! » lui lança Miles, à sa suite.
« - Merci, mais non. Reste avec les autres » lui répondit Frédéric.
« - Et tu comptes y aller comment ? »
« - En volant, bien sûr ! » répliqua Frédéric avec un sourire.
L’instant d’après, il bondit par la fenêtre. Le voyant chuter, Miles se précipita à la fenêtre pour voir Frédéric, en flammes, s’envoler en trombe vers la structure désignée par Isaac.
« - Comme quoi, avoir le feu au cul, ça finit par payer ! »
Après cette tirade pleine d’esprit, Miles regagna ses autres compagnons ; devant la stupéfaction de voir Miles revenir seul, ce dernier leur expliqua de façon très imagée ce qui s’était passé. Après quoi, les minutes passèrent. La jeune Elizabeth regagna suffisamment d’énergie pour refermer une nouvelle brèche ... tandis que trois autres étaient apparues entre-temps.
De son côté, Frédéric était grisé par cette nouvelle sensation. Il fendait les cieux telle une fusée. Enfant, il adulait les super héros des comics et rêvait de pouvoir voler comme eux. Aujourd’hui c’était chose faite, il était telle une météorite funeste qui laissait présager de sombres futurs à tous ceux qui le voyait.
Après quelques minutes, il arriva enfin en vue de la structure cible : la Monument Tower.
Note 1 A leur première venue, Frédéric et consorts l’avaient aperçue de loin. Elle était alors encore intacte. Il s’agissait d’une tour maquillée en sculpture géante d’un ange. Mais ce que nul ne savait, c’était que cette tour renfermait les appartements de l’Elizabeth de cette dimension. Elle y avait vécu enfermée depuis sa naissance jusqu’à il y a encore peu, jusqu’à l’arrivée d’un certain Booker Dewitt qui la délivra de sa cage dorée. Dans cette cage, Elizabeth y avait reçu une instruction exemplaire pour devenir l’Agneau de Columbia, destin que lui réservait Comstock depuis sa venue au monde. Songbird, le gigantesque gardien ailé, avait tenté d’arrêter l’intrus. Ce fut au prix de l’intégrité de la tour qui avait alors perdu sa tête, son aile et son bras gauche. La structure ainsi éventrée, laissait apparaître ses entrailles. Étant donné son angle d’arrivée, Frédéric pouvait y voir les appartements d’Elizabeth et, en-dessous, une vaste machinerie similaire à celles qui drainaient les pouvoirs de l’Elizabeth de Rapture ... mais en bien plus gros. Sans attendre d’être repéré, ni même de poser pied dans ce qui restait de la tour, Frédéric envoya moult boules de feu préparer le terrain. Contrôlant encore mal sa nouvelle capacité, Frédéric ne savait pas encore faire du vol stationnaire. Il choisit alors d’atterrir directement dans la tour éventrée. A peine fut-il fait, qu’il poursuivit son travail de destruction. Il détruisit tout ce qui se dressait sur son chemin et le séparant du dernier siphon. Arrivé enfin dans la pièce, il ne prit pas la peine de l’étudier qu’il se jeta sur les différents câbles présents. Il se mit à les arracher avec toute la force qui était la sienne.
Après plusieurs minutes d’un massacre méthodique du moindre câble sur lequel Frédéric posait les yeux, ce dernier s’arrêta un instant. Au son du régime de la machinerie, qui connaissait quelques fluctuations et autres ratées, Frédéric comprit que la destruction à laquelle il s’était adonné avait eu de l’effet. Mais cela prenait énormément de temps et c’était exactement ce qui allait leur manquait. Frédéric choisit alors d’utiliser sa technique de dernier recours. Son aura de flammes s’intensifia progressivement. L’air autour de lui se mit à vibrer. Puis ce fut au tour du sol de se mettre à trembler. L’espace de quelques secondes, Frédéric se demanda ce qui allait se passer s’il provoquait une explosion d’une telle intensité à côté d’une machinerie pareille. La question de sa survie lui traversa l’esprit. Mais il y avait quelque chose sur l’autre plateau de la balance qui pesait autrement plus lourd : le sort du multivers. Dissipant toutes ses interrogations, Frédéric provoqua une terrifiante explosion au sein de la Monument Tower.
Au loin, dans les différents quartiers, ou même sur les aéronefs, tous ceux qui avaient vu la météorite traverser le ciel et s’abattre sur la Monument Tower virent la terrible explosion que Frédéric avait provoquée. Puis, l’instant d’après, une fraction de seconde plus tard, elle était déjà éclipsée par une seconde explosion autrement plus puissante et de couleur bleu virant sur le violet. Les restes de la statue furent pulvérisés et projetés sur plusieurs kilomètres autour de Monument Island.
Au même moment, à la salle d’opérations, la réaction ne se fit pas attendre. Elizabeth sentit son corps être parcouru par un surplus d’énergie. Rapidement, son corps commença à émettre une lueur bleue. Une sorte d’aura apparut autour de son corps et des doubles éthérés de la jeune femme en naquirent. Ce fut comme si le corps d’Elizabeth se déphasait de cette réalité. Puis les doubles éthérés revinrent à elle et Elizabeth vit son corps littéralement briller d’énergie.
Après quelques secondes, la jeune femme sortit de son état de transe où elle apprit à dompter les perceptions que lui renvoyaient ses sens maintenant qu’elle avait atteint son plein potentiel. Reprenant conscience de la réalité, Elizabeth se mit immédiatement au travail. Elle referma progressivement toutes les brèches du continuum espace temps qui apparaissaient dans la pièce. En quelques minutes ce fut fait mais Wade était toujours dans le même état.
« - Que se passe-t-il ? » demanda alors Jeremiah qui ne comprenait pas ce qui n’avait pas fonctionné.
« - Toutes les brèches ne sont pas fermées ! » répondit simplement Elizabeth.
« - Je ... n’en vois plus aucune » rétorqua Cochran.
« - Non, pas dans cette pièce ».
D’un geste anodin de la main, Elizabeth fit disparaître le plafond, et tout ce qui se trouvait au-dessus, dans une autre dimension. Tous contemplèrent alors ce dont parlait Elizabeth. Le ciel était devenu une vaste mosaïque de dimensions aussi nombreuses qu’infinies.
« - La singularité causée par ma "sœur" n’a duré que trop longtemps. Les dommages au tissu de la réalité sont bien plus colossaux que je ne le pensais. Vous ne devez pas rester à mes côtés, repartez chez vous ... et dites au revoir à ceux qui vous sont chers si jamais je ne parvenais pas à stopper l’effondrement » dit Elizabeth, complètement détachée.
La jeune femme ne semblait plus être totalement humaine. C’était comme si ses pouvoirs avait supprimé toute trace de sentiments en son esprit.
« - Nous ne partirons pas sans Wade ! » répliqua Miles.
Elizabeth regarda Miles dans les yeux un court instant. Puis elle s’avança et posa sa main gauche sur la tête de Wade tout en fermant les yeux. Le corps d’Elizabeth se mit alors à irradier encore plus de lumière. Cette lumière fut communiquée à la tête de Wade qui se mit également à briller. Fronçant les sourcils, Elizabeth donnait le sentiment de ne pas arriver à faire ce qu’elle voulait à l’origine. Elle porta alors sa main droite sur sa poitrine. Les fissures spatiales issues du crâne de Wade disparurent en un clin d’œil pour réapparaître comme surgissant de la poitrine d’Elizabeth. Après quoi elle enleva sa main gauche du crâne de Wade qui tomba alors au sol comme un pantin désarticulé.
« - J’ai pris la place de votre compagnon comme singularité-point de rencontre des dimensions, partez maintenant ! »
« - Pour pouvoir rentrer chez nous, nous devons au préalable retourner dans ta dimension d’origine » répondit Cochran.
« - Il est inutile de faire cela, vous y êtes déjà. Quand vous avez coupé les deux premiers siphons de ce bâtiment, ça a été brutal pour moi, tout autant qu’il y a quelques instants. Involontairement, j’ai créé une brèche dimensionnelle qui a englobé la planète entière et l’a fusionnée à la Terre 1960. Il n’y a plus de Terre 1960 α ! »
Tous furent stupéfaits par ce qu’elle venait de dire si bien qu’Elizabeth dût ajouter une phrase supplémentaire.
« - Partez maintenant ! »
Tout en disant cela, elle tendit les bras vers le ciel et commença à exercer son pouvoir à son maximum.
« - Qu’est-ce qu’on fait ? » demanda Miles.
« - On fait ce qu’elle nous a dit ! On ouvre le portail de retour ! » répliqua Cochran en sortant le module de Richard.
« - Et Frédéric ? » demanda Sandora.
« - Je ne peux rien vous promettre mais dès que j’arrive je leur ordonne de maintenir le portail ouvert le plus longtemps possible » répondit Cochran en activant le module.
Immédiatement, un portail lumineux s’ouvrit mais Cochran hésita, se sentant coupable puisque sentant que tous étaient réticents à partir.
« - Nous ne pouvons rien faire pour aider Elizabeth ! » ajouta-t-il.
« - Vous autres mammifères avez vraiment des tendances suicidaires. Nos morts ne serviront à rien ! » dit alors Giaz en passant le portail.
Cochran lui emboîta le pas, tandis que Miles récupérait Wade, inconscient.
« - Je ne pars pas sans lui ! » protesta Sandora.
Jeremiah posa sa main sur l’épaule de Miles et lui fit comprendre d’y aller. L’homme avança à contrecœur si bien qu’il ne restait plus que Sandora et le vampire.
« - Cochran et Giaz ont raison. Nous ne sommes d’aucune utilité ici et nos morts seraient inutiles » dit alors Jeremiah pour convaincre Sandora.
« - Je n’abandonnerai pas Frédéric ! »
« - Et s’il ne revient pas ? Crois-tu que c’est ce qu’il aurait voulu, que tu restes sur cette Terre à mourir inutilement ? Il nous a lui même dit de partir dès que l’occasion se présenterait ! »
« - Je reste ! » dit-elle, décidée.
« - Alors moi aussi ! »
Les secondes qui s’écoulèrent semblèrent être des heures quand soudain un trait de feu apparut dans le ciel et grossit à vue d’œil. Tous deux se mirent à sourire en reconnaissant Frédéric arriver.
« - QU’EST-CE QUE VOUS FAITES ENCORE LA ? » cria-t-il tandis qu’un tonnerre surnaturel retentissait dans le ciel.
« - ON T’ATTENDAIT !! » répondit Sandora.
Frédéric sourit et avança vers le portail.
« - PARTEZ DEVANT » dit-il à ses deux amis.
Une fois ceux-ci ayant passé le portail, Frédéric se retourna vers Elizabeth. La peau de la jeune femme ressemblait à de la porcelaine éclairée de l’intérieur par une lumière bleue ... et parcourue de fissures à l’intensité lumineuse prononcée. Elizabeth sentit le regard de Frédéric et le regarda en retour.
« - Merci ! » lui dit-il simplement avant de passer le portail à son tour.
Une fois l’homme partit, Elizabeth se mit à sourire avant de pousser son pouvoir dans ses retranchements. Sa peau se fissura de plus en plus, émettant une lumière éblouissante jusqu’au point de rupture. L’explosion qui s’ensuivit fut cataclysmique et ébranla la cité de Columbia dans son intégralité. L’énergie dissipée, il ne restait rien d’Elizabeth qui puisse témoigner de sa présence ici et du sacrifice qu’elle avait fait pour réparer le tissu de toutes les réalités qui s’étaient entrouvertes dans le ciel.
Cette explosion, ainsi que celle qui eut lieu à Monument Island eurent raison des conflits qui ébranlaient la cité aérienne. Quiconque avait survécu à ces heures sombres était maintenant hébété, comme émergeant de vapeurs alcooliques. Malheureusement pour eux, ils n’auront pas le temps de se reconstruire, ni même de fêter l’armistice consensuel que déjà une nouvelle menace émergeait de sous les nuages et avait le visage d’Atlas.
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FIN DE L’ARC 16
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Note 1 : Apparence de la Monument Tower
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Note Exodimensionnelle
Si vous vous rappelez du chapitre 100, à l’origine Wade se nommait Miles avant qu’un démon ne tente d’asservir leurs esprits en les fracassant l’un contre l’autre et n’échange une partie de leur identité.
Tous les personnages qui apparaissaient dans les paragraphes exodimensionnels dans ce quintuple épisode sont tous les doubles de Wade. Leur prénom contiennent tous la syllabe "mil" et leurs noms signifient presque tous la même chose ou sont presque tous dans la même thématique. Cela donne, double après double :
Milciades Entierro : "entierro" signifie "enterrement" en espagnol
Amilcare Sirkö : "sirkö" provient de "sírkő" qui signifie "pierre tombale" en hongrois
Milla Hilarriak : "hilarriak" signifie "pierre tombale" en basque
Hamilton Tombstone : "tombstone" signifie "pierre tombale" en anglais
Millehard Grabstein : "grabstein" signifie "pierre tombale" en allemand
Milorad Umershiy : "umershiy" signifie "mort" en russe
Émile Postridge : Ici, il n’y a aucune signification particulière, mais il n’a pas été choisi au hasard.
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J'espère que vous aurez apprécié cet arc qui s'est avéré beaucoup plus long que prévu à l'origine.
Néanmoins j'ai pris beaucoup de plaisir à l'écrire.
Rendez-vous la semaine prochaine pour un nouveau chapitre de Terre 530
Mer 30 Déc - 11:36 par Shion