Terre 593 - Sanctuaire - Temple du Capricorne

Presque immédiatement après avoir achevé leur conversation, Mort, Famine et Reinhardt virent un portail d’énergie bleue s’ouvrir à leurs côtés tandis que Frédéric reprenait tout juste connaissance et le plein contrôle de son corps.
Redressé, celui-ci observa le portail et comprit à qui ils le devaient ; celui-là même qui les avait transportés en ce lieu, Janus. Puis Frédéric se retourna vers ses camarades et comprit que Famine et Mort n’avaient pas encore cédé leur place à ses amis. Frédéric et Famine échangèrent un regard silencieusement mais lourd de sens. Le regard de Frédéric était plein de défiance et de hargne envers les deux cavaliers étant donné que lui-même avait eu maille à partir avec Guerre. Tandis qu’il soutenait le regard de Famine, Frédéric eut la surprise de voir la glace composant son armure fondre à vue d’œil. Le regard bleu et vide de Famine devint celui de Jeremiah tandis que derrière lui, Mort s’estompait et les chairs de Wade réapparaissaient comme si les muscles et tendons n’étaient que des fils sur un métier à tisser.

Jeremiah fit un signe de tête à Frédéric que tout était rentré dans l’ordre. Wade de son côté était aussi stoïque qu’à son habitude. Néanmoins, il fut celui qui avança et traversa le portail le premier. Jeremiah lui emboîta le pas. Frédéric jeta un dernier coup d’œil aux alentours. A travers le toit endommagé du temple du Capricorne, il percevait au sommet de cette montagne sacrée une forme gigantesque et informe. Mais plus étrange encore, il avait du mal à se concentrer dessus, comme si cela n’avait été qu’un phosphène ; une rémanence, une persistance négative due à une exposition à une puissante source lumineuse. Il ne savait pas trop ce que c’était mais avec l’apparition du portail il avait le sentiment que leur épreuve était finie. Puis il se tourna vers Reinhardt.

« - Tu viens ? »

« - Comment tu fais ? » lui demanda-t-il.

« - Comment je fais quoi ? »

« - Comment tu fais pour accepter que ton cavalier te submerge ? »

Frédéric baissa les yeux pensivement. Non pas par honte mais afin de trouver comment formuler sa réponse. Puis il releva le regard.

« - Je ne l’accepte pas ! Je me sers de toutes les armes à ma disposition et réserve celle-ci en guise de dernier recours ».

« - Comme ... d’un mal nécessaire ? » hésita Reinhardt.

« - On peut dire ça ! » fit Frédéric après réflexion.

« - S’ils sont en nous, il doit y avoir une raison. Les ennemis que nous affrontons sont de plus en plus puissants et nous devrons avoir recours à la puissance des cavaliers d’une manière ou d’une autre. Autant apprendre à la maîtriser au plus vite ».

« - Maîtriser leur puissance ... La faire nôtre ... » répondit Reinhardt pensivement, réfléchissant à la façon dont il avait fait plier les essences démoniaques en son être.

« - Que ce soit Wade, Jeremiah ou moi-même, nous avons tous notre façon de nous rapprocher de cet objectif en fonction de nos propres caractères et de ceux de nos cavaliers. A toi de trouver celle qui te le permettra également ... mais il faut que tu le fasses car si jamais Pestilence se libère avant que tu n’aies appris à le maîtriser, j’ai peur que ce soit définitif » fit Frédéric en regardant la paume de Reinhardt.

« - J’ai perdu plusieurs années, prisonnier d’un corps que j’ignorais être le mien. Il est hors de question que cela recommence ! » répondit-il avec conviction.

Il pensait avoir scellé Pestilence définitivement mais comme il le lui avait dit, il profiterait de la moindre brèche dans ses sceaux. Il était temps qu’il réfléchisse à un moyen de le canaliser et de lui passer la laisse autour du cou comme pour les démons avant lui.
Tous deux finirent par passer le portail.
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Univers ??? - Grande Bibliothèque - Rotonde

Le portail franchi, Reinhardt et Frédéric se retrouvèrent dans la rotonde de la Grande Bibliothèque. Jeremiah et Wade les y avaient précédés et face à eux se tenaient les dieux Athéna, Tyr et Janus. Rien de bien étonnant en soit mais quelque chose chiffonna Frédéric. Où que son regard se posait, il ne voyait ni Milla ni les autres membres de leur groupe.

« - Où sont-ils ? » demanda-t-il sans préliminaire.

« - Peu importe ! Ce qui importe réellement c’est le ré... » commença à dire Athéna de façon assez froide.

« - Je t’arrête tout de suite ! Peu importe que tu sois une déesse, si je n’ai pas immédiatement ... » commença à faire Frédéric en avançant d’un air menaçant vers la déesse avant que la lame d’une épée ne vienne pointer sa gorge.

Frédéric remonta la lame du regard jusqu’à voir le bras gauche musculeux du dieu Tyr. Mais cela ne sembla pas l’impressionner.

« - Vous ne respectez pas le protocole ! » fit calmement Tyr, ne lâchant pas Frédéric du regard.

« - Tu me regardes bien là ? » lui demanda Frédéric.

Tyr ne lâcha pas un mot de plus lorsque soudain il sentit à son tour la pointe de la lame d’une épée presser sa gorge. C’était au tour de Jeremiah de menacer autrui. Mais la seconde suivante, il se retrouva à son tour menacé par la pointe de la lance d’Athéna elle-même. Mais le vampire ne cilla pas. Tout comme Frédéric, il désirait ardemment retrouver son groupe, notamment sa fille adoptive. Il était déterminé à aller jusqu’où il le faudrait pour cela.
Ce fut au tour de Wade d’entrer en scène. Malgré la nature surnaturelle des lumières de ce lieu, la luminosité baissa drastiquement lorsqu’il commença à puiser dans les ressources de Mort.
Reinhardt soupira un instant et se volatilisa pour se retrouver dans le dos de Janus.

« - Beau mouvement mais si vous croyez me surprendre ainsi, c’est peine perdue » fit le dieu en devenant tout à coup vieux.

« - Ce n’était pas mon but, uniquement pour te faire comprendre que je suis prêt à me battre ! » répliqua Reinhardt.

« - En es-tu sûr cette fois ? ... Mais peu importe ; je ne suis pas un dieu de la guerre. Je ne suis pas porté sur la violence pour répondre à la moindre contrariété » rétorqua Janus.

« - Nous avons été manipulés à maintes reprises et il est hors de question que cela recommence. Donc soit vous répondez à ma question soit on va avoir un sérieux problème » fit Frédéric.

« - En tant que dieux de la guerre de nos panthéons respectifs, nous n’avons pas l’habitude de céder aux menaces ! » fit Athéna, froidement.

Sans que Reinhardt ne perçoive son mouvement, Janus se déplaça en un instant hors de sa portée comme s’il n’avait fait qu’un rapide pas. Il revêtait cette fois son apparence futuriste.

« - Vos amis sont toujours là où vous les avez laissés. Nous sommes actuellement sur un plan légèrement déphasé du leur, par précaution, tout comme vous l’étiez sur la précédente Terre dès que j’ai ouvert mon portail » intervint Janus en relevant les armes d’Athéna et de Jeremiah en les prenant entre l’index et le pouce de chaque main.

Tous deux se laissèrent faire et baissèrent leurs armes, perdant toute velléité. Voyant Jeremiah se calmer immédiatement et sentant l’atmosphère se réchauffer, Wade se calma à son tour et la lumière revint à un niveau normal.
Seuls Frédéric et Tyr ne se lâchaient pas du regard.

« - Pourquoi cette précaution ? » demanda Frédéric avec une hargne mal dissimulée.

« - Regarde-toi ! Tu éprouves encore les vapeurs de rage de Guerre ! » fit Tyr, toujours aussi calme depuis leur arrivée.

Froid, mais calme.
Le dieu baissa son épée lentement.

« - Et deux de tes compagnons montrent un enclin malsain à puiser aussitôt dans les pouvoirs de leurs cavaliers après ce qu’il vient de se passer sur l’autre Terre. Que ce serait-il passé si quelque chose vous aviez énervés en présence de vos proches ? » ajouta le dieu nordique.

Frédéric comprit alors leur motivation et se calma comme il put. Reinhardt se replaça derrière ses trois compagnons.

« - Veuillez nous excuser ; nous n’avions pas compris que vous agissiez dans notre intérêt » fit alors Jeremiah.

« - Vos réactions ne nous étonnent pas. Personne n’est préparé à gérer l’essence de cavaliers » répondit Tyr.

« - Mais c’est ce qui vous a pourtant fait échouer à l’épreuve que je vous ai opposée » fit Athéna.

« - Quoi ? » fit Frédéric, étonné, parlant pour les quatre.

« - Comme vous l’aviez deviné, il ne s’agissait pas que de gravir les marches ... mais aussi de faire preuve de cohésion. De vous battre ensemble » répondit Athéna.

« - Ce qu’ils ont fait au niveau de la Maison du Taureau » rétorqua Tyr.

« - Mais qu’ils n’ont pas fait face à Thanatos ! » surenchérit Athéna.

« - Qui n’était pas sensé faire partie de l’épreuve ... comme d’autres ».

« - Ce sont les aléas de la vie, nul ne peut prévoir ce qu’il va se passer dans telle ou telle dimension » fit Athéna, sur un ton glacial, en défiant Tyr du regard.

Tyr détourna le regard. Non pas par crainte d’elle, mais parce qu’il savait pertinemment que cela ne servait à rien de continuer à jouer à son jeu. Autant l’arrêter de suite donc.

« - Quoi qu’il en soit, je suis celui en charge du respect du protocole ainsi que SEUL juge à décider de la réussite des épreuves ... Étant donné les circonstances et le choix malheureux de cette dimension de poche, l’épreuve est annulée ! »

« - Pardon ? » fit Athéna.

« - Ils vont se confronter à leur Gåte Fraach ... tous ensemble ! » fit Tyr sur un tel ton qui signifiait qu’il n’y avait pas à revenir sur sa décision.

« - Janus ... si tu veux bien ? »

Janus reprit alors son apparence classique et procéda au recalage de phase afin de retrouver le reste du groupe de nos héros. Ceux-ci avaient vu s’ouvrir le portail de Janus il y a quelques minutes de cela et ne comprenaient pas pourquoi personne n’en sortait. Presque tout le groupe sursauta lorsque les quatre cavaliers ainsi que les trois dieux apparurent soudainement.

Milla se jeta dans les bras de Frédéric avec une passion dévorante. Blanche vint se blottir contre la poitrine de Jeremiah tels une fille et son père. Le corbeau de Wade, qui s’était perché en hauteur dans la rotonde, sembla surgir de nulle part et se poser sur son épaule.

« - Ton épreuve contre ton gardien semble avoir été plutôt ... sauvage » fit Frédéric en constatant que les vêtements de Milla étaient en charpie.

Milla gloussa d’amusement.

« - Tu n’as pas idée. A ce sujet ... il faut que je te dise quelque chose ... »

« - Veuillez me suivre à présent ! » intervint Tyr d’une voix solennelle, coupant court aux retrouvailles.

« - Peut-être plus tard. Il va nous emmener à notre prochaine épreuve » fit Frédéric en s’éloignant de Milla pour suivre Tyr.

Voyant que Jeremiah enjoignait Blanche à le suivre, Milla demanda s’ils étaient tous concernés. Tyr lui répondit par l’affirmative sans s’arrêter, ni même tourner la tête. C’est ainsi que Tyr fut suivi par les quatre cavaliers, Blanche, Milla, Isaac, Wormcell, qui suivait simplement le mouvement, et Sandora fermant la marche.

Quant à Janus, il se retira de la scène via l’un de ses portails et Athéna s’éclipsa sans dire un mot, donnant presque l’impression d’avoir été froissée.

Dans la rotonde, Tyr ouvrit une porte si parfaitement dissimulée qu’elle semblait faire partie du mur même ; le dieu semblant de venir de la découper. Après un long couloir, le groupe vit se dresser face à eux un gigantesque mur. Un mur semblant n’être composé que de rouages et d’engrenages de toutes sortes.
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A suivre dans le chapitre 503 : le Gåte Fraach, part 1 : Découverte !